dimanche 30 août 2015

NINQUÉN, 2002, COLCHAGUA, MONTGRAS



Ma cave a atteint un âge où je peux maintenant ouvrir sans regrets des vins de 10 ans ou plus sur une base très régulière. J'entre dans la phase où je récolte le fruit d'un investissement qui nécessitait foi et patience. Je dis foi car se monter une cave fortement composée de rouges chiliens nécessitait d'avoir la conviction ne pas se tromper sur le potentiel de garde réel de ces vins, lorsque bien choisis. C'est plaisant d'avoir accès sans contraintes à ce type de vins évolués car ils sont rares sur le marché. Le vin âgé coûte cher et en ce sens monter sa propre cave est non seulement un investissement au strict plan du vin, mais aussi en termes économiques. Je n'ai pas seulement une cave qui prend de l'âge. J'ai aussi un blogue qui dure depuis bientôt 6 ans. Je suis donc rendu au point point où il vaut la peine de revenir sur un vin dont j'ai déjà traité il y a plusieurs années. Je reviens donc, 5 ans plus tard sur le Ninquén, 2002. Un vin qui avec le temps est devenu un classique abordable du rayon des spécialités de la SAQ.. L'archétype en jeunesse du vin chilien que certains aiment mépriser. Un vin riche au fruité mature et copieusement boisé. Qu'est-ce que ça donne après 12 ans en bouteille? J'ai écrit cette note de dégustation sans relire ce que j'avais écrit à son sujet il y a 5 ans.

La robe est toujours bien soutenue, bien que légèrement translucide et orangée au pourtour du disque. Le nez exhale avec modération de beaux arômes fruités, rouges et noirs, avec la cerise au marasquin qui se démarque clairement, le tout marié à des notes de bois de cèdre, d'épices douces évoluées et de torréfaction. La bouche est à la fois raffinée, généreuse et ample. Le vin possède encore un bon volume et le fruit montre un aspect sérieux à cause d'une solide dose d'amertume qui absorbe bien la douceur du fruit. Le boisé est fondu et ajoute un aspect épicé lui aussi dépourvu de douceur. Le milieu de bouche confirme cette impression de généreuse austérité. Il y a de la matière et de la concentration, les tanins sont soyeux et abondants et l'amertume marque l'impression d'ensemble sans engloutir le fruit. Heureusement. La finale est très persistante sur un mélange de cerises, de kirsch et de chocolat noir..

Je vante souvent les rouges chiliens de type Reserva pour leur équilibre modéré qui sait éviter l'excès. Ici on est clairement dans une autre catégorie, une catégorie plus ambitieuse en terme de matière et de concentration. Peut-être à cause de cela le vin est relativement peu évolué compte tenu de son âge. Ce n'est plus une jeunesse, mais il en a encore beaucoup sous la pédale. C'est donc un vin plus puissant et imposant que les vins que je bois normalement. Comme mentionné précédemment, le vin est aussi dénué de douceur et l'amertume y joue un rôle important. C'est très bon, mais moins facile à boire, comme s'il y avait plus de vin à chaque gorgée. C'est donc une bouteille sérieuse que j'ai bue très lentement et que j'ai bien appréciée. Le vin a gagné en harmonie après plusieurs heures d'aération, l'amertume étant moins notable. Il me reste deux bouteilles pour continuer de le suivre.





dimanche 23 août 2015

CARIGNAN, CORDILLERA, VIGNO, 2010, MAULE, VINA TORRES



Un été où je bois peu, donc peu d'occasion d'écrire, et je dois l'avouer, peu d'envie. À quoi bon écrire de nouveau sur un Cab ou un Sauvignon Blanc, si bons puissent-ils être? Voilà que j'ouvre une bouteille de Carignan, ça n'arrive pas si souvent, j'ai donc repris le clavier. Je n'ai pas trouvé de détails sur l'élaboration de ce vin, sinon que pour avoir droit à l'appellation VIGNO le vin doit contenir au moins 60% de Carignan, être totalement issu de vieilles vignes non irriguées de la vallée de Maule. Les cépages greffés sur de vieilles vignes de Païs peuvent entrer dans la composition des vins portant l'appellation VIGNO.

La robe est de teinte foncée, bien soutenue. Le nez est retenu et dégage une impression de fruits sauvages mâtinés d'épices douces. À cela s’amalgame un aspect terreux et une légère touche chocolatée. Le profil est très agréable sans être d'une très grande complexité. La bouche de son côté se montre plus volubile et son discours capte l'attention des papilles. Le style du vin se rapproche de l'archétype européen avec une ligne svelte et des tanins fermes. Le fruité est de belle qualité, toujours bien marié à l'aspect doucement épicé et appuyé sur bonne base d'amertume. Le milieu de bouche permet de confirmer le caractère sérieux dégagé par ce nectar. Le niveau de concentration est bon, il y a toute la matière nécessaire, mais la compacité de l'ensemble empêche toute impression d'excès. La fermeté des tanins apporte une bonne mâche et un brin de rusticité, ce qui n'empêche pas le vin d'être assez facile à boire, même si on est pas dans le registre du gouleyant. La finale conclut logiquement le transit buccal de ce liquide, tout en densité et en fermeté, et avec une longueur appréciable.

Certains europhiles diraient probablement de ce vin qu'ils l'aiment car il est différent du stéréotype chilien. Moi je dis plutôt que c'est un bel exemple de la versatilité croissante du Chili qui peut maintenant produire une grande variété de styles. Ici tout est réuni pour produire un vin de style européen. D'abord un producteur espagnol, un cépage du même pays et des vieilles vignes non irriguées. Ceci dit, le terroir demeure chilien ce qui permet aux vignes d'être plantées franches de pied (sans greffage). Un vin plus naturel donc que des vins qui se drapent de cette pseudo vertu. Un vin aussi qui présente une rusticité de bon aloi, surtout au niveau tannique. Cependant, cet aspect devrait s'adoucir avec plus de temps en bouteille. Pour le prix payé en Ontario, 19.95$, c'est un bon achat, sans être une grande aubaine. Beaucoup de rouges chiliens moins chers et plus traditionnels, dans le contexte chilien, offrent plus de finesse en jeunesse, mais ce Carignan offre un côté distinctif qui justifie la prime. LA SAQ offre le millésime 2011 de ce vin pour 31$. Je ne l'ai pas goûté, mais à ce prix le facteur RQP me semble évacué de la proposition. Difficile d'expliquer un écart de prix si marqué entre les deux monopoles, et comme souvent, la LCBO favorise plus le client.