mercredi 22 août 2012

SAUVIGNON BLANC, LAUREL VINEYARD, 2009, LO ABARCA, SAN ANTONIO, VINA CASA MARIN




Après le controversé 2005 qui évolue très bien, voici que j'ai pu mettre la patte sur un autre millésime de cette cuvée parcellaire. Avec la cuvée « Cipreses », ce vin a contribué à faire la réputation de Casa Marin depuis le premier millésime en 2003. Les premiers millésimes de ces vins pouvaient être déroutants pour l'amateur habitué à une esthétique européenne, mais depuis 2007 un tournant stylistique donne à ces vins un aspect plus civilisé. Les fruits entrant dans l'élaboration de ce vin sont vendangés manuellement. Le jus reste en contact avec les peaux pour une journée avant une fermentation à 14° C. Le vin est entièrement élaboré en inox. Il titre à 15% d'alcool pour un pH de 3.25.

La robe est de teinte légèrement verdâtre. Le nez est quelque peu retenu mais il est possible d'y détecter des arômes de lime et de fruits de la passion, complétés par un une légère touche végétale et un aspect évoquant pour moi la roche mouillée des ruisseaux à truite de mon enfance. En bouche, le vin montre un bel équilibre entre la fraîcheur et la rondeur. L'acidité y est bien présente, mais modérée par le gras et la matière généreuse du vin. C'est un vin consistant, avec du volume, qui déploie des saveurs fruitées de grande intensité mélangeant, comme au nez, citron, lime et fruits de la passion. Le milieu de bouche confirme la pleine présence de ce vin au niveau de concentration supérieur. La finale conclut en beauté et avec générosité sur une bonne persistance des saveurs.

Je suis un amateur des vins de Casa Marin. C'est à mon sens une maison admirable par son esprit pionnier et la qualité générale de ses vins. Mais je dois avouer que j'étais très dubitatif à propos de ce vin lorsqu'après l'achat j'ai constaté que son titre alcoolique affiché sur l'étiquette était de 15%. Sur le site web du producteur on mentionne plutôt 14%. Je redoutais donc un vin lourd et alcooleux à l'équilibre déficient. Heureusement, et à ma grande surprise, il n'en est rien. Ni au nez, ni en bouche l'alcool ne se fait sentir de façon négative. Toutefois, je pense que le haut taux d'alcool contribue à la rondeur quasi onctueuse de celui-ci et cela fonctionne admirablement en donnant un vin de Sauvignon au style distinctif. En terme qualitatif, ce vin est clairement d'un niveau supérieur qui justifie amplement son prix de 25$. Si on ajoute son style distinctif à l'équation, ce prix est encore plus justifié. Ceci dit, certaines maisons chiliennes qui n'ont pas encore la réputation de Casa Marin offrent des vins de Sauvignon Blanc de même niveau qualitatif à bien meilleur prix. Toutefois, ces vins montrent un style plus habituel pour ce cépage, plus nerveux et moins opulent que cette cuvée Laurel. C'est ce style plus nerveux que je préfère, mais un vin comme ce Laurel a sa place pour moi sur une base moins régulière.

vendredi 17 août 2012

SAUVIGNON BLANC, RESERVA, 2011, CASABLANCA, VINA SANTA RITA





Ceux qui me lisent avec une certaine régularité savent l'importance que j'accorde aux prédispositions mentales dans l'appréciation du vin. Ce Sauvignon Blanc de Santa Rita me semble un bon vin pour mettre au défi la capacité d'un dégustateur à rester indépendant d'esprit dans son jugement. D'abord, c'est un vin chilien de prix modeste (15.45$ au Québec et 13.95$ en Ontario). C'est aussi un vin de milieu de gamme chez un très gros producteur. Déjà il partirait avec trois prises contre lui pour plusieurs snobinards de la bouteille (origine, prix, taille du producteur). Mais la beauté de l'histoire, c'est que ce vin de pedigree somme toute modeste a récemment obtenu une ronflante note de 95+ de la revue britannique Decanter, tout en terminant premier d'une dégustation à l'aveugle de vins de Sauvignon Blanc chiliens menée par l'expert britannique en vins chiliens Peter Richards, battant au passage de nombreux vins plus chers et plus réputés. Ce résultat est rien de moins que surprenant et ne peut faire autrement que piquer la curiosité, à moins que ce ne soit soulever le scepticisme. Toujours est-il que la dégustation à étiquette découverte sera exigeante car si on se fie à Decanter ce vin n'est rien de moins qu'exceptionnel.

La robe arbore une teinte pâle et verdâtre typique des jeunes vins de ce cépage. Le nez évite l'exubérance et la retenue en exhalant franchement des arômes de fruits de la passion, de citron et de cassis auxquels s'entremêlent de légères notes végétales de feuillage et de poivron vert. Le profil me semble typique des bons vins de Sauvignon de Casablanca, avec ce côté citronné élégant. En bouche, le vin se démarque dès le départ par un très bel équilibre intégrant acidité et rondeur sur une matière aux saveurs éclatantes et intenses. Le milieu de bouche révèle un niveau élevé de concentration qui donne beaucoup de présence à l'ensemble. Une amertume évoquant le zeste d'agrume supporte très bien l'aspect fruité, alors qu'une juste dose de gras absorbe l'acidité pour produire une agréable sensation tactile qui permet au vin de couler sans effort. La finale condense l'essence de ce vin avec un sursaut d'intensité et une longueur de calibre supérieur.

Ma conclusion sur ce vin en décevra peut-être certains car elle n'est pas tranchée. J'ignore ce qu'est un vin se méritant une note de 95+, alors ne me demandez pas si Decanter a péché par excès d'enthousiasme. Ceci dit, les experts de la revue britannique sont loins d'avoir erré en donnant un classement favorable a ce vin, car celui-ci en donne clairement beaucoup plus que le prix qu'on en demande. Il a un équilibre, un niveau de concentration et une persistance qu'on associe généralement à des vins de catégories supérieures. Ce vin est donc une formidable aubaine. Pour ceux qui aiment détester par avance les vins à forts volumes et issus de grosses compagnies, ce vin est la preuve qu'il faut éviter les généralisations. Aussi, pour ceux qui aiment remettre en cause la valeur incontournable de la dégustation en pure aveugle, un vin comme celui-ci a la vertu de poser la question à l'envers. Franchement, j'ai dégusté plusieurs bouteilles de ce vin en toute connaissance de cause, mon appréciation de celui-ci fut assez similaire de fois en fois, mais au final je ne pourrais jurer que mon jugement n'a pas été altéré par l'éloge enthousiaste qu'a reçu ce vin de prix modeste. Je persiste à croire que seul un contexte favorable de dégustation en pure aveugle pourrait me donner l'heure juste. C'est vrai pour ce vin et c'est vrai pour tous les autres. À étiquette découverte, il faut rester très prudent et humble face à soi-même. Ce qu'on sait d'un vin, et la relation de ce savoir avec nos convictions personnelles, influence immanquablement notre jugement et il est impossible de départager tout ça soi-même par la suite. C'est pourquoi je ne note pas les vins que je déguste et c'est aussi ce pourquoi je demeure un partisan inébranlable de la dégustation à l'aveugle comme outil de contrôle.



jeudi 16 août 2012

Sauvignon Blanc: Le Chili pourrait déloger la Nouvelle-Zélande en pole position

Rassurez-vous, le titre de ce court article n'est pas un autre de mes élans d'enthousiasme pour se qui se passe actuellement dans le Chili vinicole. Non. C'est le constat qui sert d'introduction à un article intéressant du New Zeland Herald à propos de l'émergence du Chili en tant que producteur de Sauvignon Blanc de qualité. L'article n'est pas condescendant. Il est plutôt réaliste et illustre le fait que le Chili joue maintenant sur le même terrain que les Kiwis. On y mentionne même qu'il y a plus de variété stylistique au Chili pour les vins de Sauvignon Blanc de qualité. On y rapporte les propos de Felipe Marin qui est maintenant en charge de l'élaboration des vins chez Casa Marin à Lo Abarca, et ceux de l'expatrié néo-zélandais Grant Phelps qui œuvre avec brio comme œnologue en chef chez Casas del Bosque dans Casablanca, un des meilleurs producteur de Sauvignon Blanc du Chili. Un élément négligé par l'article est que le Chili, en plus d'offrir de la haute qualité et des variantes stylistiques, offre ses vins de Sauvignon à des prix imbattables.

mercredi 15 août 2012

CABERNET SAUVIGNON, LEGADO, 2003, MAIPO, VINA DE MARTINO


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Avec les références que j'ai données dernièrement sur les belles performances de rouges chiliens de haut niveau dans des dégustations à l'aveugle j'ai pu donner l'impression qu'il faut payer relativement cher pour toucher aux vertus du bon vin rouge chilien de garde. Ce n'est bien sûr pas le cas. Rien de mieux qu'un Cab de Maipo, élaboré par un producteur fiable, pour confirmer encore une fois qu'au Chili il n'est pas nécessaire de payer une fortune pour de réels vins de garde.

La robe est de teinte encore bien soutenue, même si légèrement translucide. Le nez est un pur ravissement et montre un profil de Cab mi-évolué tout en finesse. On y retrouve d'agréables arômes de cassis, de cerise, de bois de cèdre, de terre humide, complétés par de fines notes vanillées, ainsi qu'un très léger aspect évoquant le bois brûlé et le chocolat noir. Difficile de rendre fidèlement en mots le profil aromatique de ce vin, si ce n'est que de rappeler que ces arômes portent la marque caractéristique que seul le temps en bouteille peut procurer. Le plaisir se poursuit en bouche avec un vin à la fois svelte et assez ferme. L'ensemble est sérieux, mais sans lourdeur. C'est un régal pour l'amateur de Cabernet avec une belle palette de saveurs juste assez patinées par le temps. Le fruit tient encore le premier rôle, mâtiné de notes terreuses et doucement épicées et soutenue par une fine dose d'amertume rappelant le chocolat noir de qualité. Le milieu de bouche révèle un vin équilibré et modéré comme je les aime. Les tanins sont fondus, mais montrent ce qui leur reste de poigne dans une fin de bouche rendant hommage aux attributs du bon Cabernet, en intensité, fermeté et longueur.

Que dire sur ce vin qui n'aurait pas l'air d'une redite de ma part sur le potentiel de garde incroyable des rouges chiliens de type "Reserva"? Je pense que je ne peux faire autrement que me taire ou frapper sur le même clou. Souvent je me tais, car ma cave arrive dans une phase où ces expériences sont de plus en plus fréquentes. Jouer toujours le même disque est redondant, je le sais, mais parfois je me dis qui si par une redite je pouvais convaincre ne serait-ce qu'un seul amateur. Ça vaudrait la peine. Pour revenir à ce Legado, celui-ci n'est pas proche de son déclin. Il est plutôt à un beau stade de son évolution. Je pense qu'en pure aveugle il pourrait se mesurer à des vins bien plus renommés et beaucoup plus chers. Il est rendu à cette étape de son parcours où le caractère typique de son origine cède le pas au caractère universel du cépage. Pour les chiliophobes ça devrait être un argument positif, mais malheureusement, peu importe l'âge, ce sera toujours écrit Chili sur l'étiquette, et même si De Martino est un producteur élite de ce pays, ça ne résonnera pas très fort chez les amateurs de prestige. Pourtant, la vallée de Maipo est un des meilleurs terroirs à Cabernet au monde. Certains en parlent comme du Médoc chilien, mais même les comparaisons françaises ne peuvent abattre le déficit de prestige pour certains qui ne jurent que par les châteaux bordelais ou le culte de Napa. C'est pourquoi le Chili demeure le pays qui en matière de vins de garde en offre le plus pour chaque dollar investi. Pas besoin de dépenser dans les super-vins chiliens qui tentent de gagner en prestige en attirant les victimes de l'effet Veblen. Ce pays a tant à offrir qu'il y a plein d'excellents vins offerts à prix ridicules, et ce Legado en est un superbe exemple. J'ai payé ce vin autour de 17$ dans le temps, et en terminant la bouteille je ne peux m'empêcher de penser que ce prix est ridiculement bas. Ce n'est pas moi qui fait le marché, et j'ai la patience de mettre ces vins de côté, alors aussi bien en profiter.

P.S.: Parlant de taper sur le même clou. Je viens de m'apercevoir qu'il y a un an presque jour pour jour j'avais commenté le millésime 2002 de cette cuvée. À quelques différences près, mes commentaires se rejoignent.





samedi 11 août 2012

SUR LE VIF

Peu de vin cet été pour moi et peu de temps et d'envie pour écrire à son propos. Je continue toutefois de lire, c'est moins exigeant.. Rien de mieux qu'une de mes marottes, le potentiel de garde des rouges chiliens, pour écrire un petit mot. Voyez cet article de Wine Spectator où un Don Melchor, 1999, de Concha y Toro a remporté la faveur d'un groupe de dégustation à l'aveugle. Dommage que l'on ne nomme que trois vins sur les sept impliqués. Ce ne semble pas être un groupe de buveurs de piquette. La conclusion de Thomas Mathews, l'expert en vins espagnols du WS, va dans le sens des résultats des dégustations d'Eduardo Chadwick et d'Aurelio Montes que je rapportais il n'y a pas longtemps ici et ici: "It testified that Chile has earned its standing in the world of wine."