samedi 28 juillet 2012

Les buveurs d'idées


Comme amateur de vin on aime penser que ce qui nous intéresse vraiment c'est le vin. Le liquide qui se retrouve dans notre verre sous différents aspects. Pourtant, plus un amateur devient intéressé et plus le vin en lui-même perd de l'importance. Je lisais l'autre jour un article où le représentant commercial d'un producteur chilien disait qu'il fallait apporter des nouveautés régulièrement (nouveaux cépages, nouvelles régions), car sans éléments distinctifs pour susciter l'intérêt, le vin devient une simple marchandise. Je me suis reconnu un peu dans ce propos. Je suis le type d'amateur intéressé par la nouveauté. J'aime les producteurs qui développent de nouvelles choses. J'aime l'idée qu'en buvant les vins de ces producteurs je participe à la création de quelque chose qui n'existait pas avant. D'autres amateurs, au contraire, s'intéressent au vin pour communier avec l'histoire. Au-delà du vin, ils aiment l'idée du lien avec le passé. L'idée qu'en buvant ces vins à la longue histoire ils perpétuent quelque chose qui les dépasse. D'autres ont une approche socio-économique. Ils s'intéressent aux vins d'artisans, aux vins biologiques car ça correspond à leurs valeurs de développement durable. D'autres encore aiment boire prestigieux et rare, ce qui veut aussi dire cher. De cette façon ils ont l'impression de toucher au meilleur de ce que le monde du vin a à offrir. Il y a aussi ceux qui boivent aux notes et à la réputation. Je suppose que cette caution externe les sécurise face à leurs perceptions.

J'aurais pu continuer d'énumérer des catégories de buveurs qui au-delà du vin sont motivés par des idées. Je lis déjà dans les pensées de certains lecteurs qui se sentiront visés et qui se diront que le vin, le liquide, est leur priorité, et que le reste est secondaire. Bien sûr, tout passionné que l'on puisse être, il est clair notre intérêt premier est le vin. Ceci dit, je pense que les idées occupent une place beaucoup plus importante que ce qu'on veut bien s'avouer. Si à partir de demain le vin devenait anonyme. Si les vins étaient identifiés par un simple code nous empêchant de les relier à leur origine. Je pense que l'intérêt d'une grande majorité de passionnés diminuerait de façon marquée. J'adore déguster à l'aveugle car il y a à la fin le dévoilement des identités. Cela me permet de me confronter aux fameuses idées qui soutiennent mon intérêt pour le monde du vin. Je ne voudrais pas d'un monde où la dégustation du vin serait toujours à l'aveugle, mais sans jamais qu'il n'y ait de dévoilement.

Il est clair pour moi qu'une bonne partie du plaisir relié au vin tient dans la confrontation entre le simple liquide offert dans un verre et la construction mentale qu'on s'est bâtie pour appréhender celui-ci. Sans repères pour ancrer notre jugement, le monde du vin serait bien moins intéressant. Ce produit de civilisation deviendrait un simple objet de consommation. Toutefois, je pense qu'en évoluant dans le monde du vin, il est important de garder à l'esprit que notre jugement est influencé par les idées qui nous intéressent et auxquelles on adhère. Je persiste à croire fermement qu'une bonne partie de l'appréciation du vin relève du monde des idées, de la conviction mentale. Garder ce fait à l'esprit est une façon de prémunir notre jugement de l'influence de ce qu'on pense lorsqu'on ne déguste pas à l'aveugle. Si on peut boire des idées, comme pour le vin il faut essayer d'éviter qu'elles nous saoulent.

vendredi 6 juillet 2012

Le Chili est un producteur de classe mondiale (Prise 2)

Je suis tombé sur un article intéressant dans le San Francisco Chronicle, et au risque d'en agacer certains encore plus, le mouvement initié par Eduardo Chadwick prend de l'ampleur. Un autre producteur chilien de renom s'est lancé dernièrement dans l'aventure de faire goûter ses vins à l'aveugle en parallèle avec certains des plus grands noms de la planète vin. Cette fois-ci c'est Aurelio Montes qui a eu l'audace de soumettre ses vins haut de gamme à la comparaison directe avec des noms mythiques et très onéreux. Comme dans le cas des dégustations de M. Chadwick, le but déclaré n'est pas de prouver une quelconque supériorité de ses vins, mais plutôt de démontrer qu'ils sont légitimement à leur place à côté de ces noms prestigieux. Dans le cas de la dégustation axée sur la cuvée Sena, dont je parlais le dernière fois, un intervenant avait dit en réaction que les dés étaient pipés en faveur du Sena, étant donné qu'il y avait autant de millésimes de Sena que de vins renommés. Dans le cas de la dégustation de Montes, cet argument est à balayer totalement du revers de la main, car il y avait trois vins différents de Montes pour neuf vin renommés, tous du millésime 2004, sauf pour le Carmenère, Purple Angel, de Montes qui était un 2007. Il n'y avait qu'un millésime de chaque vin impliqué. Il y avait une vague de huit vins de type bordelais où le Cabernet Sauvignon, "M", de Montes a terminé deuxième, et le Carmenère, Purple Angel, quatrième. Il y avait aussi une vague de vins de Syrah/Shiraz où la cuvée Folly de Montes a pris le premier rang, presqu'à égalité avec le Grange de Penfolds.

Finalement, j'aime toujours voir les notes sur 100 dans ce type de dégustations à l'aveugle. Sans la présence d'étiquettes, on ne note pas haut, ce qui montre bien que les très hautes notes ne viennent pas seulement des impressions de dégustation, mais bien aussi du statut du vin impliqué. Les juges étaient des journalistes spécialisés, somelliers et professionnels du vin. Encore une fois, la conclusion n'en est pas une de supériorité, mais bien de légitimité des vins chiliens. Les meilleurs de ces vins sont à leur place avec ce qui se fait de mieux au monde. Le Chili peut produire des vins de classe mondiale et même si les grandes cuvées de Montes sont des aubaines par rapport aux autres vins de cette dégustation. Il est possible de trouver des aubaines encore plus formidables venant du Chili. Ceci dit, un des vins de Montes est presque une aubaine. Si acheté lors d'une promo -10% à la SAQ, le Purple Angel se qualifie pour ma limite de 50$!!!

mardi 3 juillet 2012

SUR LE VIF

Article intéressant avec Frédéric Brochet à propos de la construction mentale impliquée dans la dégustation du vin. Ce scientifique confirme que la disposition mentale, la conviction par rapport à un vin influent significativement sur le niveau d'appréciation de celui-ci. J'étais déjà au courant des travaux de Brochet à ce sujet et mon expérience personnelle m'a souvent confirmé la justesse des ses constats. Disons que ça me conforte dans mon approche face au vin.