mercredi 30 juin 2010

Le Chili impressionne au premier concours mondial du Sauvignon

Le premier concours mondial dédié aux vins issus du cépage Sauvignon Blanc a été tenu dernièrement à Bordeaux. Ceux qui me lisent savent que je suis un grand promoteur des vins de Sauvignon Blanc issus des nouvelles régions fraîches du Chili. J'ai souvent écrit que ces vins étaient les meilleures aubaines au monde pour les vins de ce cépage non boisés. J'ai souvent écrit que les bons exemples de ces vins pouvaient se comparer à de bons exemples de la Loire, vendus passablement plus chers. Cette prise de position m'a valu quelques bosses, mais n'empêche. J'ai persisté et signé, et ça continue. Tant pis pour ceux qui ne peuvent reconnaître ce fait. Toujours est-il, que j'ai souris quand j'ai pris connaissance des résultats de ce concours. Le Chili y a fait très bonne figure, et mon vin fétiche pour ce cépage au Chili, le Sauvignon Blanc, "Cipreses Vineyard" de Casa Marin, du millésime 2009, a remporté le prix du meilleur Sauvignon Blanc non boisé de la compétition. Bien sûr, tous les meilleurs vins n'étaient pas là, et un concours demeure un concours, avec ses aléas, mais en bout de ligne, un des meilleurs chiliens y était, en sol français, et il a fini premier.

http://www.bordeauxpresse.com/upload/article/CMSauv_Palmares2010_FR.pdf

Voici un extrait évocateur d'un court article sur ce concours:

The highlight of the day was an incredibly elegant flight of Chilean (I'm told) Sauvignon Blancs that are far from the woody, over-the-top, pungent examples that one sometimes associates with new or inexperienced producers chasing a market fad. In fact, the Sauvignons were delicate and fruity, with some wines having persistent minerality and even smoky, flinty characters.

http://www.sommelierindia.com/blog/2010/06/concours_mondial_du_sauvignon.html?utm_source=twitterfeed&utm_medium=twitter&utm_campaign=Feed%3A+SommelierIndia+%28Sommelier+India%2C+The+Wine+Magazine%29

http://www.decanter.com/news/299653.html

http://www.youtube.com/watch?v=T1kG_KDtxUk


*

samedi 26 juin 2010

CABERNET SAUVIGNON, MARQUES DE CASA CONCHA, 2003, ALTO MAIPO, CONCHA Y TORO


Les bons vins de Cabernet Sauvignon de l’Alto Maipo, de type Reserva, sont à mon avis des vins de garde sous-estimés. Ils montrent dans leur jeunesse cette fameuse “typicité” qui en fait de réels vins de terroir, exprimant clairement le lieu d’où ils proviennent. Alors qu’avec l’âge, ils perdent graduellement cette “typicité” du lieu, pour se recentrer sur un profil classique de Cabernet évolué, ce qui en fait alors des alternatives très abordables à des bordeaux de la rive gauche ou des CaliCabs de bon niveau, vendus beaucoup plus chers. Pour ce qui du vin dont il est question ici, il provient du même vignoble que le réputé Don Melchor. En ce sens, on pourrait le qualifier de second vin. Il est moins concentré et moins boisé que son grand frère, mais ce n’est pas nécessairement une mauvaise chose. Ce vin m’avait beaucoup impressionné en jeunesse, tellement que j’en avais alors acheté une caisse pour évaluer son potentiel de garde. Cette bouteille est la deuxième de douze. Le vin a été dégusté sur trois jours, la seconde moitié ayant été conservée deux jours en demi-bouteille pleine. Le vin a très bien tenu, et m’a même semblé un peu mieux équilibré en seconde moitié.

La robe est toujours bien foncée et opaque. Superbe nez de Cabernet en début d’évolution, complexe, avec des arômes de cassis, de cerises, de terre humide, de menthol, de bois de cèdre, de thé, d’épices douces et de chocolat noir. En bouche, le vin est encore plein de vivacité, avec un fruité noir très intense, amalgamé à de subtiles notes terreuses d’évolution, et appuyé sur une solide base d’amertume. Un brin d’épices douces du boisé de prime jeunesse persiste et vient enrichir le mélange de saveurs. Le milieu de bouche montre un vin qui a commencé à s’affiner en perdant un peu de sa rondeur et de son gras de jeunesse, et montrant maintenant un profil plus dense et compact. Le corps est moyen, avec un bon niveau de concentration et une trame tannique à la fois souple et affirmée. La finale voit l’intensité monter d’un cran sur un heureux mariage des saveurs et une persistance de très bon calibre.

Je ne peux pas dire que ce vin m’a surpris, car j’avais des attentes assez élevées. En fait, il m’a donné en plein ce que j’en attendais à ce stade, c’est–dire un vin qui a conservé une bonne partie de sa vigueur de jeunesse, mais qui commence lentement à s’affiner, et à développer des arômes d’évolution. À mon goût, le point idéal d’évolution n’est pas encore atteint. Il lui faudra facilement cinq autres années de garde pour l’atteindre. Avec mes dix bouteilles restantes, j’aurai tout le loisir de vérifier cela. C’est d’ailleurs la beauté de ce genre de vin de garde au RQP exceptionnel. On peut renouveler l’expérience plusieurs fois dans le temps, et vraiment suivre le vin dans sa transformation.


*

mardi 22 juin 2010

Vin et expertise

Ce matin j’ai reçu une question me demandant combien de temps il fallait pour devenir spécialiste en matière de vin. Je n’ai pas répondu à la question, ignorant la réponse, mais j’y ai tout de même réfléchi. Disons que la première chose qui me soit venu à l’esprit, c’est que l’expertise est une notion très relative. Ensuite, je me suis dit que le monde du vin est un champ très vaste à explorer, et ce, sous plusieurs angles. Finalement, je me suis dit que le temps nécessaire pour acquérir le statut de spécialiste en vin devait dépendre de l’intensité qu’on mettait dans l’apprentissage, et aussi de nos connaissances préalables.

On peut se demander pourquoi un simple amateur de vin pourrait bien vouloir devenir expert en la matière. Pour des professionnels, on peut comprendre la motivation. Mais pour un amateur, je n’en vois pas l’utilité. Je ne dis pas qu’il faille renoncer à apprendre. Je dis juste que le plaisir et la curiosité devraient être les moteurs de la démarche, pas le désir d’atteindre un statut d’expert. Aussi, il ne faut oublier l'aspect monétaire de l'équation. Cet élément, dépendant des moyens ou des valeurs, peut être limitatif. En plus, et c'est là où tout se mêle un peu,  il faut dire que le petit monde du vin est un qui peut paraître intimidant pour le néophyte. C’est un monde où une certaine catégorie d’amateurs aime bien étaler son expérience et ses connaissances, en espérant se donner de la crédibilité et de l’importance. Je peux donc comprendre qu’un nouveau venu dans le domaine puisse vouloir gagner en expertise assez rapidement. Malheureusement, vin et ego sont souvent liés, le premier servant alors d’outil pour élever le deuxième. Personnellement, je n’ai jamais eu le désir de devenir un spécialiste en matière de vin. Si j’avais eu ce désir, il y a longtemps j’aurais réorienté mon intérêt vers des contrées plus prestigieuses. Certains, pensant peut-être me consoler, me diraient que je suis un expert en vins chiliens. Ne vous en faites pas, en connaître un peu sur un sujet n’intéressant presque personne ne fait pas de soi un expert. Simple effet de contraste.

Comme je le disais au début, la notion d’expert en est une très relative. Je pense que l’amateur de vin ne devrait pas se préoccuper de devenir un expert. Encore une fois, il devrait se laisser guider par le plaisir et par sa curiosité. Bien sûr, au passage, il accumulera des connaissances. Ces connaissances nouvelles pourront en cours de route l’aider à orienter son parcours. Mais la quête de connaissances ne devrait pas être le but de l’exercice. Peut-être que vers la fin de son périple, l’amateur ayant été motivé d’abord et avant tout par le plaisir pourra être considéré par certains comme un expert. Si c’est le cas, celui-ci sera alors le meilleur des experts qu’on puisse imaginer, car il le sera devenu malgré lui, et ne se considérera pas lui-même comme tel.


*

vendredi 18 juin 2010

SAUVIGNON BLANC, AMAYNA, 2008, LEYDA, VINA GARCES SILVA




C’est une période tranquille en ce qui me concerne côté vin. Je pense que tout amateur, même le plus passionné, devrait s’allouer des périodes de faible consommation. Je trouve que ça aide à rétablir la perspective. Quand on déguste beaucoup, pendant longtemps, on perd une certaine fraîcheur dans le regard. Un effet de saturation se développe. C’est donc un peu rafraîchi, du moins je l’espère, que j’ai abordé cette bouteille de Sauvignon Blanc de l’excellent producteur Garces Silva, qui est à mon avis un des meilleurs du Chili. J’avais adoré leur Sauvignon Blanc, du même millésime, élevé en barriques. Celui-ci ne voit pas le bois et est élevé sur lies en inox pendant deux mois. Le titre alcoolique déclaré par le producteur est 14.5%, mais selon la SAQ, ce titre serait plutôt de 15.6%. Ce qui me semble très élevé, encore plus pour un vin blanc. Ce vin a reçu les éloges de la critique américaine (IWC, WA, WS). Fait intéressant, Josh Raynolds de IWC a même conclu sa note de dégustation par cette phrase que je traduis librement: “Je placerais ce vin aux côtés de plusieurs des meilleurs Sauvignon Blanc de la Loire dégustés dans la dernière année.” Je me sens un peu moins seul tout à coup!... Voyons si l’enthousiasme de M. Raynolds est justifié.

La robe est d’une teinte jaune plutôt pâle aux reflets verdâtres. Le nez s’exprime avec modération, déployant un profil typique du cépage avec des arômes de citron, de fruits de la passion, de melon, de poivron vert et d’herbe coupée. Une légère et surprenante touche florale ajoute un brin de charme à l’ensemble. En bouche, l’attaque est pleine et équilibrée, avec un heureux mélange d’acidité et de rondeur. Le vin a du gras, presque de l’onctuosité, et remplit très bien la bouche de sa généreuse matière. Le profil gustatif est fidèle à ce qui était perçu au nez, avec le citron qui domine, bien complété par l’aspect végétal. Le milieu de bouche confirme le niveau de concentration supérieur et l’aspect volumineux du vin. La finale est riche et intense, avec une longueur de haut calibre aux légères rémanences amères. L’alcool se fait légèrement sentir si le vin n’est pas assez frais.

Mon verdict? Un vin clairement de haut calibre, avec plusieurs attributs de très bon vin, mais à l’équilibre quelque peu précaire. Un vin qui marche sur un fil de fer, même s’il n’a rien d’aérien. Ce qui fait qu’on peut s’interroger presqu’à chaque gorgée sur son équilibre. C’est ma troisième bouteille de ce vin, et c’est la troisième fois qu’il suscite en moi l’ambivalence. La fraîcheur de mon regard, espérée en introduction, n’y a rien changé. La matière de ce vin est impressionnante, mais je ne peux m’empêcher de me demander si ce n’est pas trop. Le style est clairement limite, et le 15.6% d’alcool de la SAQ me trotte dans la tête, mais en même temps les qualités du vin sont indéniables. Une chose est sûre toutefois, la température de service est critique. Celle-ci ne devrait pas excéder 12° C, et devrait idéalement être à 8-10° C. Ce vin est offert à 24.75$ à la SAQ, mais sera offert dès le 26 juin à la LCBO pour aussi peu que 17.95$. Au prix de la SAQ c’est un bon achat, mais au prix de la LCBO, c’est une formidable aubaine. En résumé, je dirais qu’on a affaire à un Sauvignon Blanc de fort calibre, mais situé à la limite en terme de style.


*

mercredi 9 juin 2010

CABERNET SAUVIGNON, FELINO, 2007, MENDOZA, VINA COBOS


Si mon intérêt pour les vins du Chili ne se dément pas, probablement à cause du progrès en cours dans ce pays, allié à la diversification croissante de l’offre en terme de cépages et de terroirs. Mon intérêt pour l’Argentine décroît. Quand j’ai le goût d’un bon rouge généreux, offert à prix avantageux, je considère que c’est encore une adresse fiable. Mais je trouve que les vins rouges issus de ce pays se ressemblent trop, peu importe le cépage. Pour ce qui est des blancs, j’adore le Torrontès qui produit de beaux vins floraux à prix très abordables. Sinon, l’offre en blanc demeure très limitée. Un autre point qui justifie ma relative perte d’intérêt pour les vins rouges argentins, est le fait que j’ai eu autant d’expériences heureuses que malheureuses avec la garde de ces vins. J’ai ma courte liste de producteurs fiables pour la garde, avec en tête de liste Catena, Weinert et Zuccardi, mais pour les producteurs que je ne connais pas ou mal, c’est un peu pile ou face. Ayant le goût pour un jeune rouge généreux, comme ce pays sait si bien en produire. J’ai donc décidé d’y aller pour un vin de Vina Cobos, l’opération du californien Paul Hobbs en Argentine. Ce vin est en réalité un assemblage comprenant 86% de Cabernet Sauvignon, complété pour le reste par un mélange de Merlot, Malbec, Petit Verdot et Syrah.

La robe est sombre et opaque. Dès le premier contact, le ne révèle son origine “mendozienne” par un aspect que je n’arrive pas à nommer clairement, mais qui pour moi correspond à un rouge de Mendoza. Au-delà de ce caractère, on retrouve un profil au fruité mature et au boisé bien présent, avec des arômes de cerises et de fruits noirs, de chocolat noir, de vanille et autres épices douces. En bouche, le vin se montre sous un jour ample et souple, avec un doux fruité bien mûr, allié à des arômes doucement épicés, auxquels un trait d’amertume s’ajoute pour venir un peu équilibrer cette douceur. En milieu de bouche, la douceur et la souplesse de l’ensemble persistent, ce qui n’est pas un mal, sur un bon niveau de concentration et avec une présence tannique assez légère. On retrouve donc un vin qui coule facilement malgré la bonne densité de sa matière. La finale poursuit en droite ligne de ce qui était déjà entamé, avec une touche de chocolat au lait qui s’ajoute sur une persistance de bon niveau.

Un vin que j’ai bien aimé, malgré le fait qu’il ferait hurler les puristes qui ont le néologisme “sucrosité” aux lèvres dès qu’ils détectent un vin montrant ce profil. La réalité est que ce vin est très bien fait dans son style. On peut décider de ne pas aimer ce style. Ce n’est d’ailleurs pas mon style de vin favori, mais il m’arrive d’avoir le goût pour ce genre de vin, et je serais alors bien fou de bouder mon plaisir pour une stupide question de principe. Pour ajouter une raison de l’éviter à ceux qui aiment haïr ce genre de vin. L’éminent Jay Miller lui a octroyé un ronflant 91. Les notes précises demeurent pour moi absurdes, mais celle-ci montre une certaine cohérence avec la philosophie générale de Parker, qui privilégie la maturité du fruit, et ne rechigne pas sur les arômes boisés. Pour ce qui est de la garde de ce vin, c’est un pari que je n’oserais pas prendre, ce qui ne veut pas dire qu’il ne pourrait pas être gagné.


*

dimanche 6 juin 2010

Quelle est la plus pure expression du terroir?

Depuis que je m’intéresse au vin, j’ai toujours été un peu mal à l’aise avec un certain langage, qui si il était utilisé à propos d’autre chose pourrait donner froid dans le dos. On aime y parler de classe, de race, de pureté, de supériorité innée, de grandeur, d'ordre, de naturel. On aime aussi y parler d'authenticité. On aime y distinguer le vrai du faux. Pour plusieurs amateurs enflammés, le “vrai” vin est un don de la nature où l’intervention humaine est la plus restreinte possible. La nature, dans son expression supérieure, serait pure et vraie, et l’action humaine altérerait, cette vérité, cette pureté. Donc, selon les tenants de cette vision, il faudrait le plus possible éviter de changer ce qui est naturel pour atteindre les meilleurs résultats possibles. La sélection clonale de la vigne serait à proscrire, tout comme les pesticides et herbicides dans la culture de celle-ci. Au chai, il faudrait fermenter seulement avec des levures indigènes, en utilisant peu ou pas de sulfites. Il faudrait manipuler le vin le moins possible en utilisant que des techniques traditionnelles. Il faudrait éviter l’ajout de tout produit exogène, et ne pas coller ni filtrer le produit final. Tous ces éléments favoriseraient, selon les tenants de cette approche, l’obtention de vins authentiques, de vrais vins de terroir.

Étant biochimiste de formation, j’ai beaucoup de difficulté avec cette vision idyllique des choses. N’empêche. Chaque fois que je lis de pareilles affirmations, je me sens un peu comme un amateur de “sous-vins”, de “faux vins”. Peut-on s’intéresser aux vins du Nouveau-Monde et s’intéresser au “vrai vin”? Pour aggraver mon cas, je m’intéresse en particulier aux vins du Chili. Un pays dont la production est axée très majoritairement sur l’exportation, et contrôlée surtout par des entreprises de bonnes tailles. Ces entreprises ont tendance à adapter leurs vins aux demandes du marché. Il n’y a pas de vision singulière, de désir d’authenticité, derrière la plupart des vins qu’elles produisent. Même la redécouverte et le développement d’un cépage comme le Carmenère ne vient pas d’un désir d’originalité. C’est le résultat d’une certaine incompétence historique. Comme vous pouvez le voir, avec mon intérêt pour le Chili et ses vins, ma place semble loin d’être assurée au rayon des amateurs de “vrais” vins. Le syndrome de l’imposteur me guette!!!

Vous vous demandez peut-être où je veux en venir avec ce préambule un peu convenu sur l'approche naturelle et minimaliste qui confine au vrai et au faux? Voici. Dans mes lectures vinicoles récentes, je suis tombé sur deux passages entre lesquels j’ai fait un lien, et qui m’ont amené à la réflexion que j’expose ici. Le premier est tiré d’un texte français traitant du cépage Syrah dans le Rhône septentrional. Ça va comme suit:

La syrah présente une fertilité modérée ce qui joue positivement sur l’aspect qualitatif du vin produit ; de plus, le porte-greffe SO4 a été abandonné dans cette région, car il entraînait une baisse du potentiel aromatique et une dilution de tous les caractères (couleur, sucre, tanin) du fait de plus gros rendements. Les porte-greffes les plus couramment utilisés sont le Couderc 3309 sur schistes et granite et le 164R sur argilo-calcaires

Le deuxième est une traduction libre de ma part, tirée d’un texte du britannique Tom Cannavan du site “Wine-Pages”:

Toutes les vignes de De Martino sont plantées sur leurs propres racines. “Si vous changez les racines, vous changez le lieu” dit Eduardo. “Si vous plantez du Cabernet au même endroit, sur trois différents porte-greffes, tous auront un goût différent, donc évidemment les porte-greffes ne permettent pas la plus pure expression du terroir”

Le lien que j’ai fait entre ceux deux extraits m’a remonté un peu le moral... Bien sûr, je n’ai jamais vraiment pensé être amateur de “faux vins”. Je ne crois pas à ce type de catégorisation méprisante. Mais quand même, je me disais qu’à ce jeu alambiqué du vrai et du faux, les vins chiliens avaient au moins un argument de poids en leur faveur. Personnellement, j’ai toujours pensé qu’une partie du caractère distinctif général de ces vins venait du fait que la très grande majorité des vignes de ce pays poussent sur leur propres racines, contrairement à ailleurs au monde, et que la nature des racines a une influence sur le profil général des vins. Bien sûr, le lien avec la pureté et l’approche minimaliste m’a été inspiré par la citation d’Eduardo Jordan, oenologue et découvreur de nouveaux terroirs chez De Martino, au Chili. Il est quand même ironique de penser que tous ses tenants du naturalisme posent un geste fondamentalement contraire à ce qu'ils prônent, et ce, dès la plantation de leurs vignobles. Il me semble y avoir là une contradiction troublante. Pour rester dans le ton, j’oserais dire un péché originel. Il faudrait préserver des levures indigènes, essentielles à l’authenticité et à la qualité des vins, mais dès le départ on peut changer les racines pour celles venant d’autres espèces de vignes, et souvent croisées entre elles par l'action humaine. En ce sens, l’affirmation d’Eduardo Jordan me semble jeter un sérieux pavé dans la mare des amants de l’idée d’authenticité naturelle.

Personnellement, je ne crois pas que les vins chiliens soit les plus purs, ou les plus athentiques, car issus de vignes non-greffées. Toutefois, je pense que cette particularité doit être tenue en compte lorsqu’on aborde ces vins. Je pense qu’étant conscient de cette particularité, on peut regarder le Chili et ses vins d’un autre oeil. Qu’on le veuille ou non, ce pays, de par la nature même de sa viticulture, produit à la base les vins les plus naturels au monde. Si on ajoute à cela le fait qu’il s’agit du pays présentant les conditions les plus favorables à l’agriculture biologique. Je pense qu’il faudrait aborder ce pays vinicole de façon différente, car c’est un endroit vraiment particulier pour produire du vin, et ce faisant, ceux-ci ne peuvent qu’être distinctifs, car différents à la base de 99% de ce qui est produit ailleurs dans le monde. Ajoutez à cela une mosaïque grandissante de terroirs et de cépages, et le tableau est encore plus riche.

Finalement. Pour répondre à la question de départ. Je ne crois pas à la pureté naturelle, même si les excès humains existent. J’ai toujours prôné que le vin n’était pas un produit naturel, mais une création humaine découlant d’un contrôle éclairé de la nature. Je pense aussi qu’il faut faire attention avec les catégorisations manichéennes. Le vin est un liquide issu de processus biochimiques complexes, mais il devrait être abordé simplement, en évitant d’y projeter des valeurs qui lui sont étrangères.

http://www.1001vins.net/1001_VINS/la_syrah.html

http://www.wine-pages.com/organise/de-martino.htm


*

mardi 1 juin 2010

Malbec: Quand l'Argentine influence Cahors

Qui a parlé de monde à l'envers?... Voici un lien vers un article de la revue "World of Fine Wine", à propos d'une dégustation de vins de Malbec, argentins et cadurciens (Merci à Vin Québec pour le lien). La conclusion est qu'il n'est pas si facile de distinguer l'origine des vins, principalement à cause du fait que de nombreux Cahors montrent aujourd'hui un profil plus mature que par le passé. Ce serait là un signe de l'influence du modèle argentin. Pour moi, la relative surprise de la dégustation est la performance du Malbec, 2007, d'entrée de gamme d'Achaval-Ferrer. Ce vin est classé parmi les meilleurs par les trois dégustateurs, et bien devant la très dispendieuse cuvée "Vignoble Unique" Mirador du même producteur, et devant beaucoup d'autres vins de plusieurs fois son prix. J'ai commenté sur ce blogue la très belle qualité de la version 2008 de ce vin qui est toujours disponible à la SAQ. Voilà un autre élément venant soutenir ma conviction maintes fois répetée, voulant qu'il est possible de trouver en Amérique du Sud des vins formidables à des prix très abordables. Nul besoin de se ruiner pour bien boire, et pour le même montant investi, on peut suivre de multiples bouteilles du même vin dans le temps. Ce qui ajoute au plaisir et enrichi l'expérience globale.

http://www.finewinemag.com/docs/Malbec%20Argentina%20&%20Cahors%20.pdf

http://levinauxantipodes.blogspot.com/2010/03/malbec-2008-mendoza-achaval-ferrer.html


*