samedi 27 mars 2010

CHARDONNAY, ADAMS ROAD, 2006, MARGARET RIVER, VASSE FELIX


La région de Margaret River est située sur la pointe sud-ouest de l’Australie. Le climat y est sec et relativement frais. Selon mes lectures, au niveau de la chaleur, c’est comparable à Bordeaux. Bien sûr, là comme ailleurs, la location exacte et l’exposition des vignobles sont importantes. Vasse Felix furent les premiers en 1967 à s’installer dans cette région pour y produire du vin. Concernant cette cuvée Adams Road, elle n’est pas référencée sur le site du producteur. J’ignore pourquoi et je n’ai donc pas de détails à propos de son élaboration.

Belle robe à la teinte dorée bien soutenue. À l’olfactif, l’intensité est modérée, avec un beau profil aromatique incluant la pêche, le citron, la poire, la noisette et la fumée. Beau nez intriguant, difficile à bien décrire, où le fruit est bien présent, sans être dominant. Au plan gustatif, on remarque d’entrée un bel équilibre. Le vin est ample et souple, avec des saveurs fruitées bien affirmées, mais bien complétées par de fines notes de noix et de caramel. L’impression d’équilibre se poursuit en milieu de bouche. Rien n’est excessif dans ce vin qui coule sans efforts sur une texture légèrement onctueuse. La finale montre un beau fondu de saveurs, avec le petit côté caramelisé qui ressort un peu plus, le tout sur une allonge très respectable.

Beau vin de Chardonnay, à la fois fidèle au cépage, mais en même temps qui évite le piège de la standardisation. J’ai particulièrement aimé l’heureux mélange entre le fruité et les autres types d’arômes. Ce vin n’est actuellement plus disponible à la SAQ, mais à un peu moins de 25$, c’était un bon achat, même si on ne peut pas, dans l’absolu, le qualifier de grand RQP. Tout de même, ça demeure une façon abordable de découvrir le côté plus frais de l’Australie.


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lundi 22 mars 2010

CABERNET SAUVIGNON/MERLOT, NOVAS, 2007, VALLÉE CENTRALE, VINEDOS EMILIANA


Vinedos Emiliana est une maison qui appartient à famille Guilisati. Cette famille est aussi l’actionnaire principal de Concha y Toro, le géant vinicole du Chili. Ce qui distingue Vinedos Emiliana, c’est son approche biologique, voire biodynamique, voie empruntée il y a une dizaine d’années, après l’embauche d’Alvaro Espinoza, le précurseur et le leader de ce mouvement au Chili. Les deux vins au sommet de la hiérarchie de la maison, les cuvées “G” et “Coyam”, sont les deux premiers vins certifiés biodynamiques du Chili. Les vins des autres gammes, sont issus de raisins certifiés de culture biologique. C’est le cas de ce Cabernet/Merlot de la gamme Novas. Il est composé de Cabernet Sauvignon à 62% et de Merlot pour les 38% restants. 70% de l’assemblage a été élevé en barriques de chêne pendant 12 mois, le reste étant garder sous inox. Le vin titre à 14.5% d’alcool et montre un très faible taux de souffre libre à 17 mg/L, ce qui est en ligne avec la philosophie biodynamiste de la maison.

La robe est sombre et opaque. Le nez est frais et assez intense, avec un mélange d’arômes de fruits rouges et noirs, auxquels s’entremêlent des notes d’épices douces, de menthol, ainsi qu’un léger trait torréfié. En bouche, l’attaque est équilibrée, pleine et ample. Le doux fruité montre un bel éclat et une bonne intensité, et est heureusement supporté par une juste dose d’amertume. Le milieu de bouche révèle un vin de corps moyen, avec une belle richesse de matière. La concentration est de très bon niveau et la texture tannique toute en finesse. Le finale voit les saveurs gagner encore en intensité, sur une allonge de fort calibre aux relents de chocolat noir.

Un vin de très belle qualité, immanquablement chilien, car typique de ce que l’on peut attendre de ces deux cépages lorsque cultivés sur le plancher de la chaude vallée centrale chilienne. Avec des saveurs mûres et intenses, enrobées d’une agréable fraîcheur mentholée, et complétées par un apport boisé bien mesuré. Ce vin ne réinvente rien, mais il livre la marchandise à la perfection. Je ne sais pas si la culture biologique y est pour quelque chose, mais le fruit montre un éclat et une intensité que l’on rencontre rarement, surtout dans un vin de 15$. À ce prix, c’est sans l’ombre d’un doute un excellent RQP.


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vendredi 19 mars 2010

MALBEC, 2008, MENDOZA, ACHAVAL FERRER


Achaval Ferrer est un producteur argentin qui en moins d’une décennie a su se tailler une réputation fort enviable sur la scène mondiale, en restaurant et exploitant de vieux vignobles dans la région de Mendoza. Les rendements sont sévèrement contrôlés, à peine 33 hl/ha pour ce Malbec de base, avec une philosophie d’intervention minimale en cours d’élaboration et un usage modéré de la barrique. Ce vin est non collé ni filtré et titre à 14% d’alcool pour un pH de 14%.

La robe est bien colorée, sombre, avec des reflets violacés et parfaitement opaque. Le nez, dès le premier abord, déclare son origine “mendozienne’ et possède cette signature propre à ce que je connais de ce producteur de par sa cuvée Quimera. Ces impressions sont impossibles pour moi à mettre clairement en mots. Tout ce que je peux en dire, c’est que l’expression est d’intensité moyenne, avec des arômes évoquant les bleuets et les mûres, le thé, la muscade et autres épices douces. Un aspect floral bien présent apporte une belle touche de charme à l’ensemble. Très agréable. En bouche, le vin montre de l’équilibre et une belle vivacité. Le fruité doux et intense domine la palette des saveurs, bien complété par les notes épicées et florales déjà évoquées. Le milieu de bouche montre un bon niveau de concentration, avec une matière de bonne densité, sur une structure assez compacte, et une texture tannique fine et bien serrée. La finale est sans faille, avec des saveurs qui se fondent bien et une bonne longueur.

J’ai bien aimé ce vin. La qualité est évidente pour ce jeune vin qui mise d’abord et avant tout sur la qualité de son fruit. L’apport boisé est très peu perceptible. J’ai aussi apprécié sa vivacité qui fait vraiment contraste avec le millésime 2006. Ce 2008 montre un pH de 3.5, alors que le 2006 montrait un ronflant 3.9!!! C’est une différence énorme d’acidité. Je ne sais pas si on a compris que dans Mendoza il valait mieux corriger l’acidité. Achaval Ferrer fait partie de ses producteurs à la philosophie non interventionniste. Pourtant, il n’y a pas de mal à s’adapter aux caractéristiques de son terroir. Quoi qu’il en soit, pour moi, le 2008 montre un bien meilleur équilibre d’ensemble. Une meilleure tenue en bouche, avec des saveurs éclatantes. Je pense que ce vin est une belle introduction au Malbec argentin. La quasi imperceptibilité du bois permet de prendre la mesure réelle du cépage, sans interférences. De plus, je trouve que ce vin porte la marque de son producteur. Pour moi, ça goûte le Malbec, bien sûr, ça goûte aussi Mendoza, mais ça goûte aussi le Achaval Ferrer, ce qui pour moi est une qualité. Pour toutes ces raisons, même s’il est maintenant vendu presque 25$ à la SAQ, ce vin demeure un bon achat. Même si à mon sens, il y a de meilleurs achats, si on s’en tient strictement au RQP, en terme de Malbec argentins (Catena, Zuccardi, Q). Mais pour goûter un vin avec une identité particulière, comme dans ce cas-ci, ça vaut la peine de payer un peu plus.


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dimanche 14 mars 2010

PINOT NOIR, AMAYNA, 2007, LEYDA, VINA GARCES SILVA


Petite semaine tranquille pour moi côté vin. Désolé pour le manque de nouveauté sur ce blogue, mais il faut parfois se priver volontairement d’une chose pour pouvoir mieux l’apprécier lorsqu’on y revient.

Je continue ma revue de la gamme de vins Amayna de l’excellent producteur Vina Garces Silva. La région de Leyda est une région côtière relativement fraîche, par rapport aux standards de la vallée centrale chilienne. Toutefois, là comme ailleurs, la location précise des vignobles et leur exposition sont importantes. Ceux de Garces Silva sont situés à environ 14 km de la côte, ce qui est relativement éloigné par rapport à d’autres producteurs implantés dans cette région, comme, par exemple, Chocalan qui ont planté à seulement 4 km de la côte. Cet éloignement relatif de la côte, et de son effet rafraîchissant, se reflète dans le style des vins produits par Garces Silva, ceux-ci présentant généralement un profil généreux au fruité bien mature. Il peut d’ailleurs sembler étonnant que du Pinot Noir et de la Syrah puissent être produits sur des parcelles géographiquement très rapprochées. Il faut comprendre qu’il y a presque deux mois d’écart entre la date de vendange du Pinot Noir et de la Syrah. La clef réside dans la longue saison végétative, et à la quasi absence de pluie qui permet de laisser les raisins sur les vignes très tard en saison. Aussi la Syrah a été plantée avec une exposition au nord, ce qui apporte plus de chaleur dans l’hémisphère sud. Il est intéressant de savoir que dans cette région, le cycle végétatif du Pinot démarre un mois avant celui de la Syrah. Le cycle du Pinot dure environ 200 jours, avec la vendange qui a lieu autour du 20 mars, alors que le cycle de la Syrah, dure environ 230 jours, avec la vendange autour de la mi-mai. C’est donc l’absence de pluie qui permet de garder les raisins de Syrah sur les vignes jusqu’en mai où les températures baissent sensiblement. Ainsi, il est plus facile de comprendre comment Pinot Noir et Syrah peuvent cohabiter et donner de bons résultats. Pour ce qui est de ce Pinot Noir, 2007, seulement mentionner qu’il a été élevé pendant un an en barriques de chêne Taransaud dont 30% étaient neuves, le reste étant de deuxième et troisième usages. Le vin titre à 14.5% d’alcool, pour un pH de 3.65.

La robe est d’une belle teinte rubis légèrement translucide. Le nez s’exprime avec justesse sur des arômes fruités de cerises et de fraises, auxquels s’entremêlent des notes épicées évoquant, entre autres, la cannelle, ainsi qu’une très légère pointe fumée. Relativement simple à ce stade, mais éclatant et de belle qualité. En bouche, l’attaque est ample et soyeuse, avec une légère onctuosité sous-jacente, et une belle présence fruitée vive et lustrée. C’est bien équilibré et ce qui était perçu au nez se reflète bien en bouche, mais avec plus d’intensité. L’aspect soyeux et le léger gras de ce vin marquent sa présence en bouche. Il n’y a vraiment aucune aspérité, et le vin coule sans effort sur une douce impression caressante. La finale voit les saveurs se fondre harmonieusement sur une allonge de très bon calibre.

Ce vin est une autre belle réussite pour Vina Garces Silva. Son profil général est bien typique du cépage. Il se distingue toutefois par la douceur de sa texture en bouche. Sur cet aspect, il se rapproche beaucoup des vins blancs de la maison, les tanins sont pratiquement imperceptibles, si ce n’est en toute fin de bouche, et il possède un gras qui lui donne un aspect tactile presque onctueux. Comme je l’ai mentionné, ce n’est pas le plus complexe des vins à ce stade précoce, mais l’éclat de ses saveurs, combiné à sa douce texture en font actuellement un vin très séduisant. Un vin de pur plaisir et de grande qualité. Comme on le sait, le Pinot Noir est un cépage capricieux, et pour avoir un bon niveau de qualité, il faut être prêt à débourser plus. À 32$ à la SAQ, ce vin de par sa qualité est très bien positionné face la compétition mondiale. Un bel exemple de ce que le Chili peut maintenant faire avec le Pinot Noir.

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dimanche 7 mars 2010

MERLOT, RESERVA, 2006, LIMARI, VINA TABALI


Le Merlot est un cépage qui a rarement fait bonne figure au Chili. Il y a plusieurs raisons qui expliquent ce phénomène. D’abord, il a longtemps été confondu avec le Carmenère, qu’on appelait alors Merlot Chileno. Certains producteurs faisait la distinction entre les deux, étant donné que le Carmenère est un cépage de maturité beaucoup plus tardive, mais ce n’était pas le cas de tous, surtout que les deux cépages étaient souvent plantés ensemble. Ce qui fait que le Carmenère cueilli trop tôt donnait un aspect vert à l’assemblage involontaire final. Un autre problème du véritable Merlot, c’est qu’il était planté dans la chaude vallée centrale, ce qui entraînait une maturation trop rapide pour ce cépage relativement hâtif qui préfère un peu de fraîcheur. Finalement, le dernier problème du Merlot au Chili est relié à la faiblesse de son système racinaire. Il faut se rappeler qu’au Chili, 95% du vignoble est non greffé. On plante les cépages sur leurs propres racines, et celles du Merlot sont très capricieuses et se développent mal dans certains types de sol. Cela contribue à la tendance qu’a ce cépage, dans des conditions chaudes, à la déshydratation. Pour obtenir de meilleurs résultats avec le Merlot au Chili, des producteurs ont entrepris de planter ce cépage dans des terroirs plus frais, avec de meilleurs clones qu’ils plantent sur des porte-greffes, c’est-à-dire des racines de vignes autres que celle du Merlot, comme c’est la pratique courante en Europe depuis plus d’un siècle, à cause du phylloxera. Le porte-greffe est choisi pour mieux s’adapter au type de sol, ce qui donne un meilleur système racinaire. Lorsque combiné à un climat plus frais, il n’y a plus de problème de déshydratation, et la maturation des fruits est plus lente, ce qui permet de préserver une meilleure qualité d’arômes.

J’ignore si les vignes de Merlot à l’origine de ce vin sont plantées sur porte-greffes, mais le vignoble a été planté au tournant du siècle, après la clarification de l’imbroglio avec le Carmenère. Il s’agit donc assurément d’un pur Merlot. Autre atout qualitatif, il provient de la vallée de Limari, une région relativement fraîche qui permet une lente maturation. À preuve, ce Merlot a été vendangé manuellement à la fin du mois de mai. Ce qui est la limite pour les vendanges au Chili. C’est le climat très sec, sans risques de pluie qui permet de laisser les raisins si longtemps sur les plants de vignes. Le vin a été élevé un an en barriques de chêne, 70% français et 30% américain. Il titre à 14.5% d’alcool pour un pH de 3.50.

La robe est très foncée et opaque. Le nez s’exprime avec modération et dégage de beaux arômes de fruits noirs, auxquels s’ajoutent de fines notes épicées, de l’humus, et un caractère légèrement torréfiées. Beau nez évoquant l’Ancien-Monde, avec déjà une légère touche terreuse qui laisse croire à un début d’évolution, mais avec encore un très beau potentiel, puisque le fruit de jeunesse est encore à l’avant-plan. En bouche, on retrouve un vin d’une élégance surprenante, avec une attaque bien équilibrée. Le vin montre un corps moyen, doublé d’une belle souplesse, sur une structure qui reste somme toute assez compacte. Une impression de sérieux se dégage. On est loin de la bombe fruitée et charnue, mais en même temps, les saveurs sont de très belle qualité, avec ce mélange de fruits noirs, d’épices douces, de notes terreuses et de légère torréfaction. Le milieu de bouche confirme cette impression, avec un bon niveau de matière, sans lourdeur, avec une concentration bien calibrée et un volume restreint. La trame tannique est fine, avec un léger grain qui donne une dimension tactile agréable. La finale conclut en beauté le parcours de ce vin marqué au signe du plaisir contenu, avec un beau fondu de saveurs et une persistance digne d’un très bon vin.

Deuxième bouteille de ce vin pour moi, 10 mois après la première, et le vin me semble encore meilleur. Ce vin offre un profil de vin européen propre et un peu moderne. À l’aveugle, je ne pense pas que je pourrais l’identifier comme chilien. Pour ce qui est de son identité de Merlot. Je dois avoué que je n’ai pas une idée très claire de ce que donne ce cépage. Une chose est sûre toutefois, ça se démarque clairement de la caricature du mauvais Merlot chilien. Ce vin vient de réapparaître sur les tablettes de la LCBO, dans le cadre d’un spécial sur les vins du Chili, et selon mes lectures, il est classé comme le meilleur RQP de l’offre. Pas étonnant quand on pense qu’on en demande seulement 14.95$. Un autre vin qui, s’il était d’une autre origine, plus reconnue et prestigieuse, pourrait se vendre au moins le double sans que personne ne trouve à redire. D’ailleurs, pour moi, Tabali est un des meilleurs producteurs chiliens en terme de RQP. Chez eux, pas de gros vins stéroïdés vendus à fort prix, plutôt des vins aux belles proportions et de qualité exceptionnelle pour les prix demandés. En espérant que la SAQ aille au delà de l’excellente Syrah de ce producteur qu’elle offre déjà, et ajoute au répertoire d’autres vins de Tabali.

vendredi 5 mars 2010

Du ridicule du système de notation sur 100

Texte intéressant aujourd'hui du journaliste et blogueur britannique Jaimie Goode, à propos du système de notation sur 100 (voir le lien). Comme il le mentionne, de plus en plus de gens, professionnels comme amateurs, qui écrivent sur le vin utilisent maintenant ce système initié il y a plus de 30 ans par Robert Parker. Comme il le mentionne, le culte de la note élevée a entraîné une compression de ce système qui se résume maintenant à une échelle de 11 points, avec grosso modo l'intervalle (90-94) pour les vins "ordinaires", et (95-100) pour les vins cultes, renommés, ou de prestige. Comme il le mentionne, dans l'esprit de ceux qui s'abreuvent aux notes, un vin coté 89 est un vin qui n'a pas reçu la note de passage. L'équivalent d'un vin de seconde catégorie. Toutefois, le texte de M. Goode est un peu paradoxal, car lui aussi a succombé à la pression, et utilise maintenant ce système de notation.

Personnellement, je persiste à croire que c'est le système en entier qui ne tient pas la route. Prétendre à une telle précision est une pure farce. Si au moins on utilisait des intervalles de notes, comme (88-92), (93-97), il me semble que déjà, ce serait moins ridicule. Au moins, avec un tel système, le dégustateur reconnaîterait jusqu'à un certain point ses propres limites, et l'aspect changeant du vin. Mais bien sûr, un tel système moins précis n'aurait aucune chance contre l'impression de vérité hiérarchique définitive que donne le système Parker. C'est la clef principale de son succès. Ce qui lui a permis de déclasser tous les autres systèmes.

http://www.wineanorak.com/wineblog/business-of-wine/scores-for-wines


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mercredi 3 mars 2010

GRAN RESERVA BLEND, 2006, MAIPO COSTA, VINA CHOCALAN


Voici le troisième millésime de ce vin qui m’avait surpris et intrigué dans sa version 2004, et dont le millésime 2005 m’avait complètement charmé. J’ai pu rapidement goûter ce 2006 l’automne dernier lors d’une dégustation de “Vins du Chili” tenue à Montréal. J’avais alors bien apprécié ce vin, mais ce court exercice n’est pas comparable à la dégustation sur une longue période d’une bouteille entière. Dans sa version 2006, ce vin continue de pratiquer l’assemblage dans toute la force du terme. Il est constitué cette fois-ci de Cabernet Sauvignon (31%), de Carmenère (27%), de Syrah (18%), de Malbec, (12%), de Cabernet Franc (9%), et de Petit Verdot (3%). Un assemblage presque totalement bordelais, où on a décidé de remplacer un cépage relativement faible au Chili, le Merlot, par un cépage clairement fort, la Syrah, mais qui n’est pas bordelais. Le vin est issu de vignes qui avaient 9 ans d’âge, et dont le rendement était limité à environ 35 hl/ha. Vendange manuelle, égrappage complet et macération à froid pendant 5 jours précèdent la FA. Tous les mouvements de liquide se font par gravité, sans pompage. Le vin a été élevé 14 mois en barriques de chêne français, avant d’être légèrement collé et filtré. Titre alcoolique de 14.2% et pH de 3.60.

La robe est foncée et légèrement translucide. Le nez montre une intensité bien mesurée, et exhale des arômes fruités de très belle qualité, avec de la cerise et du cassis, complétés par des notes évoquant la réglisse et la terre humide. À cela s’ajoute une fine touche torréfiée de café. Beau nez de jeune vin, où la classe est facilement perceptible. En bouche, on retrouve un vin à la structure dense, doté d’une solide acidité, d’une fine trame tannique tissée bien serré et qui exprime ses saveurs avec beaucoup d’intensité. Le milieu de bouche permet de jauger le haut niveau de concentration et toute la richesse de la matière, avec un fruité vibrant, supporté par une fine dose d’amertume, et bien complété par un juste apport boisé. La finale est à la hauteur de la grande classe de ce vin, harmonieuse, même si un peu sévère pour le moment, et montrant une longueur de fort calibre.

L’adage dit jamais deux sans trois, et la cuvée 2006 de cet assemblage vient le confirmer. Ce vin est d’un très haut niveau. Il est aussi très jeune et possède un énorme potentiel de garde. Il peut rivaliser avec tous les Almaviva et Clos Apalta issus de ce pays, mais vendus pour quatre fois plus cher, et même plus. Je pense connaître un peu le vin chilien. J’ai déjà goûté les ténors sus-mentionnés, et bien d’autres vins très bien cotés de ce pays, et honnêtement, je ne peux m’expliquer que ce vin ne soit pas aussi bien coté que ceux-ci. Dire qu’on accuse Jay Miller de coté trop haut. Pas dans ce cas-ci avec son 90. Ce faisant, il place ce vin sur le même pied, par exemple, qu'un assemblage rouge TRIO de Concha y Toro. Une véritable farce, et une autre preuve, à mon avis, du ridicule du système des notes sur 100 points. Une autre preuve aussi, que même au Chili la réputation compte maintenant pour obtenir des gros scores. En un sens, je suis désolé pour Vina Chocalan pour ce manque de reconnaissance. C’est dans mon esprit une claire injustice, mais comme acheteur, je ne peux que me réjouir, car j’ai accès à un des meilleurs vins chiliens pour un prix d’aubaine (27$). Finalement, pour en revenir à ce qui compte, c’est-à-dire ce superbe vin. Oubliez les 18% de Syrah dans la composition, je ne l’ai pas perçu. Ce que l’on obtient, c’est un vin typique des jeunes assemblages de cépages bordelais issus du Chili. Le vin est déjà approchable, mais il gagnera en raffinement avec le temps et évoluera favorablement au cours des 20 prochaines années. Ce vin est passé en coup de vent cet hiver aux succursales Signature de la SAQ. Un vin digne du centième message que je publie sur ce blogue.

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