mardi 1 décembre 2009

LE GOÛT: UNE QUESTION DE CHOIX?

Peut-on choisir son goût? Voilà une question qui peut sembler singulière. Pourtant, depuis que je m’intéresse au monde du vin, c’est une question que je me pose avec de plus en plus d’insistance. Le goût est-il quelque chose d’indépendant de notre volonté, ou est-ce le résultat d’un choix? Je lisais hier un message publié par le journaliste et blogueur vinicole britannique Jaimie Goode, et cette question m’est revenue avec beaucoup d’acuité. Voici ma traduction du premier paragraphe de son court texte sur les vins de Nebbiolo:

“J’ai décidé que j’aimais le Nebbiolo. C’est tellement non commercial, donnant des vins de couleur pâle, brutalement tannique, à l’acidité élevée, aux saveurs complexes, et difficiles à se procurer.”
http://www.wineanorak.com/blog/2009/11/nebbiolo-what-crazy-wonderful-grape.html#links


Je respecte Jaimie Goode, et apprécie bien, en général, ce qu’il écrit. C’est un vrai passionné du vin, mais ce petit paragraphe m’a jeté par terre. Pour moi, ça représente en bonne partie ce que je n’aime pas dans le monde du vin. En aucun moment il ne parle de plaisir. Son “amour” semble plus philosophique que motivé par ses sens. Il semble avoir décidé d’aimer les vins de ce cépage parce que de manière générale ça correspond avec ses principes. Rendu à ce point, peut-on dire qu’il aime vraiment? Il me semble que l’affinité réelle ne se choisit pas. Elle s’impose d’elle-même, et dans le cas du vin, elle doit relever du plaisir, d’abord et avant tout.

Quand je lis des choses semblables, je ne peux m’empêcher de penser que le choix du goût est quelque chose d’assez répandu chez l’amateur de vin, dit sérieux, même si c’est rarement exprimé de manière aussi directe. Et qui dit choix, dit adhésion, mais aussi rejet. De plus, si pour plusieurs ce qu’on appelle le goût, dans le sens de bon goût ou mauvais goût, est affaire de choix. Cela veut dire que ce type de goût affecté est une construction de l’esprit qui au bout du processus n’a que peu à voir avec les sensations que procure un vin donné. Ça devient une question de concordance par rapport à des critères prédéterminés.

Je pense qu’il faut se méfier lorsqu’on progresse dans le monde du vin du danger de choisir son goût, surtout si c’est pour le corriger. Ça ne veut pas dire qu’il ne faille pas évoluer, apprendre et découvrir. Pour moi, ne pas choisir, ça veut surtout dire ne pas rationaliser le plaisir, rester fidèle à ses perceptions, demeurer honnête avec soi-même, et éviter de se conformer à des idées toutes faites, même si elles sont du côté du classicisme, du bon goût, d’une mouvance philosophique en matière d’élaboration, ou bien de la dernière tendance branchée.

2 commentaires:

  1. Je trouve le commentaire de Jaimie Goode une sorte d'extrapolation d'une personne qui commence dans le monde du vin. On commence par aimer ce que les autres aiment, ce que nos amis aiment et ensuite, si l'intérêt y est, ce que les pros ou "connaisseurs" aiment. Reste à se défaire de cette habitude et suivre notre instinct.

    Certains pourront être poussé à sortir des sentiers battus pour être différent. Il ne faut pas oublier que le vin est un accessoire "élitiste" (malheureusement) pour beaucoup de personne. Donc choisir, comme dans le cas de M. Goode le Nebbiolo va selon moi dans ce sens.

    Pourquoi suivre la masse quand on peut se démarquer ?

    Patrick

    RépondreSupprimer
  2. Pour ceux qui ne l'aurait pas lu et que ça intéresse. Voici le texte que je citais dans mon message précédant sur la possibilité de choisir son goût.

    RépondreSupprimer